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Magazine PROF n°53

 

Dossier Educateurs en milieu scolaire

"Ils sont les acteurs de leur vie. Je ne suis qu'un guide"

Article publié le 17 / 03 / 2022.

Le Pacte pour un Enseignement d’Excellence offre aux élèves du secondaire la possibilité de bénéficier d’activités de prévention aux assuétudes pendant le temps scolaire.

Floriane de Blasi est éducatrice à l’Institut Jean Jaurès, à Charleroi, et à l’Institut Sainte-Anne, à Gosselies, écoles organisant toutes deux un enseignement général, technique et professionnel. Son statut est particulier : Floriane de Blasi est éducatrice référente aux assuétudes.

Après un graduat d’éducatrice spécialisée, Mme de Blasi a travaillé de nombreuses années dans une AMO, service d’action en  milieu ouvert, où elle faisait déjà de la prévention. C’est dans ce contexte qu’elle a rencontré Frédéric Hublet, un des coordinateurs de l'appel à projets Lutte contre les assuétudes de la Fédération Wallonie-Bruxelle.

Floriane de Blasi : « Je ne suis pas leur sauveuse, mais une personne ressource ».
Floriane de Blasi : « Je ne suis pas leur sauveuse, mais une personne ressource ».
© Frédéric Hublet

PROF : Pourquoi ces établissements ont-ils jugé utile de s’inscrire dans ce projet ?

Floriane de Blasi : Ces écoles avaient de grandes difficultés à faire respecter le cadre légal autour de la consommation du tabac et a fortiori celle du cannabis. Elles se sont rendu compte que, pour de nombreux jeunes, il n’était pas simple de respecter cette loi. Donc, que leur consommation était problématique.

Ces écoles se sont alors questionnées sur ce qui était possible en matière de prévention, de sensibilisation et d’aide aux jeunes. Car si l’exclusion, pour non-respect de la loi, était une possibilité, elle ne faisait que déplacer le problème et ne le résolvait pas.

Quels sont les objectifs du projet ? Comment faites-vous ?

Dans un premier temps, il s’agit de faire de la sensibilisation, de la prévention dans le but d’optimiser la santé des jeunes. À travers des animations en classe, dès le premier degré, j’amène les jeunes à se poser des questions : C’est quoi la santé ?, Pourquoi et dans quel contexte je consomme ? Au 1er degré, je ne parle pas des produits, mais du pourquoi de ces comportements.

Le but est d’amener le jeune à se poser des questions, à le conscientiser, à le responsabiliser dans un cadre de santé, de bien-être. Et donc lutter contre le décrochage scolaire.

Santé, bien-être et décrochage scolaire ?

Le décrochage scolaire est toujours plurifactoriel : harcèlement, soucis personnels, mauvaise estime de soi, mauvaise orientation, perte de sens dans les apprentissages… L’école n’est plus un lieu de « plaisir ». L’école peut même être la cause de souffrances.

La consommation de cannabis peut être la solution trouvée par le jeune pour pallier ce manque de plaisir, de sens, ce mal-être. Mais cette consommation risque d’être une raison de plus de décrochage. D’abord à cause de la sanction, comme l’exclusion, si le jeune enfreint les règles. Ensuite, si le jeune est « plus calme » en classe, il est plus difficile pour les enseignants de le rendre réceptif et acteur de son apprentissage. Il est apathique, arrive en retard, suit moins, perd des informations… Les résultats s’en ressentent et c’est un cercle vicieux.

Mon job est donc de trouver, avec eux, le pourquoi de cette consommation, quels en sont les impacts et comment le raccrocher à l’école. Bien sûr, je reste dans un périmètre scolaire. Je ne fais pas de suivi à domicile, ni de suivi des familles. Par contre, je sais vers qui les orienter selon les besoins.

Comment s’articule ce projet ?

Je suis à mi-temps dans chacune de ces écoles. Je suis engagée spécifiquement pour ce projet de prévention et lutte contre les assuétudes (tabac/cannabis). J’aborde les autres substances également. Ce projet s’articule autour de trois axes.

Un : la prévention. J’organise des animations dans les classes, des conférences. Les enseignants sont présents et participent à celles-ci. Cela permet de casser les étiquettes et les idées préconçues que l’on peut avoir d’un élève.

Deux : le travail en individuel avec le jeune qui en fait la demande ou qui a été orienté par un enseignant, un éducateur à venir me voir et tout le suivi qui en découle.

Et enfin trois : un aspect de formation. Par exemple, je co-construis avec les enseignants des leçons qui permettent de travailler sur ces aspects santé et bien-être dans leurs cours. Je forme également les éducateurs et enseignants qui sont sensibilisés par cette problématique.

Est-ce que la manière de sanctionner le non-respect du ROI a changé depuis la mise en place de ce projet ?

C’est un point délicat car un ROI est basé sur un cadre légal que l’on ne peut changer ni ignorer. Dans un des instituts, une modification des sanctions est à l’écriture. Ce n’est pas parce que ces écoles sont dans ce projet qu’il n’y a plus de sanction en cas de non-respect des règles.

Par contre, nous remettons du sens dans la punition. On est toujours sur le fil et donc on travaille ensemble à remettre du sens à la sanction : la direction, le jeune qui n’a pas respecté la règle, l’équipe pédagogique et moi.

Comment ce projet est-il accueilli par les élèves ? Par leurs parents ? Cela marche ?

Ce que je constate, ce sont les réalités du terrain. Je vois des élèves qui étaient en décrochage revenir à l’école, finir leur année, obtenir un diplôme. Je les entends quand ils me disent Je me sens entendu, Je ne suis plus un numéro. La difficulté est pour moi de leur faire comprendre que parfois, ils doivent trouver un soutien à l’extérieur de l’école car cela dépasse ma fonction, même s’ils ont confiance en moi. Je ne suis pas leur sauveuse. Je suis là pour les accompagner, les soutenir, les guider, mais ils sont les acteurs de leur vie. Les rênes, ce sont eux qui les tiennent.

Je rencontre les parents qui le demandent, mais jamais sans l’accord du jeune. Si la consommation est problématique, je vais travailler avec le jeune pour qu’il en parle à ses parents. Je l’accompagne, je ne le fais pas à sa place. Je suis aussi celle qui le guide vers le service ad hoc si besoin.

Dans une des écoles, avec des profs et des élèves, on souhaiterait créer une cellule bien-être. Un élève qui retrouve du plaisir à l’école a moins de risque de décrocher.

Il faut vraiment que le travail social en milieu scolaire soit valorisé car les jeunes ont besoin de personnes ressources sur le terrain. De personnes présentes sur qui ils peuvent compter.

En fait, assuétudes, santé, bien-être, c’est un tout. Les éducateurs sont en première ligne pour lutter contre le décrochage et on les oublie trop souvent.

Projets assuétudes

Chaque année, plusieurs appels à projet sont proposés aux écoles de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Dont le projet Lutte contre les assuétudes, qui permet d’offrir aux élèves des établissements secondaires des programmes de lutte contre les assuétudes grâce à de l’accompagnement médical et psychologique durant le temps scolaire.

Cet accompagnement a pour objectif de rendre les élèves acteurs de leur santé. Il est organisé en trois axes : accompagnement dans l’élaboration du projet, prévention, prise en charge thérapeutique par des experts pendant le temps scolaire.

Ce projet est mené selon les réalités de chaque école (besoins, contexte, règlement d’ordre intérieur, etc.) afin que l’école soit un lieu de prévention.

Deux dispositifs sont possibles. Soit un tabacologue est mis à la disposition des élèves qui le souhaitent afin de bénéficier de séances collectives d’arrêt du tabac/cannabis. Soit un spécialiste en assuétudes accompagne les écoles pour qu’elles initient un programme de prévention et de prise en charge des assuétudes.

Les détails de l'appel à projets 2021 se trouvent dans la circulaire 7688 (www.enseignement.be/circulaires).

Contact et informations : Direction générale de l’Enseignement obligatoire, via assuetudes@cfwb.be.

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