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Magazine PROF n°53

 

Dossier Educateurs en milieu scolaire

"On est à votre service, mais pas votre esclave"

Article publié le 17 / 03 / 2022.

Dans la ville estudiantine de Namur, l’Internat Autonome pour Garçons accueille 106 garçons du primaire, secondaire et supérieur. Rencontre avec cette famille particulière.

Alors que la météo annonçait un avis de tempête, mon collègue photographe et moi étions attendus dans ce lieu présenté comme une menace. Très souvent encore, dans la bouche des parents, il est l’épée de Damoclès sur la tête de l’enfant turbulent ou aux résultats scolaires insatisfaisants : « Si tu ne travailles pas mieux, c’est l’internat ! » ou « Si tu n’arrêtes pas tes bêtises, c’est l’internat ! ».

Pourtant, tant dans la bouche des éducateurs que dans celles des jeunes rencontrés ; l’internat, c’est tout sauf ça !

Pascal Walhin dirige cet internat autonome d’une main de fer dans un gant de velours depuis plus de 10 ans. L’internat autonome accueille des garçons de tous âges et de plus de 25 écoles de la région.

Pascal Walhin : « Nous, on les met dans les bonnes conditions pour étudier, mais on ne saurait pas le faire pour eux, ni pour les éduquer. »
Pascal Walhin : « Nous, on les met dans les bonnes conditions pour étudier, mais on ne saurait pas le faire pour eux, ni pour les éduquer. »
© FWB/Boris Roko

Instituteur de formation, devenu éducateur puis administrateur d’internat, M. Walhin a une vision imagée de l’internat, de ses missions et donc des missions de ceux qui y travaillent : « Un internat c’est comme un tabouret ». Il y a l’assise où se trouvent les jeunes et puis trois pieds.

Le premier pied est celui du chef, le second les éducateurs qui veillent aux aspects pédagogiques et éducatifs, le troisième le personnel ouvrier de l’internat. Qu’un de ces trois pieds soit bancal, défaillant, et ce sont les jeunes qui vacillent. Pour que tout se passe bien pour les jeunes, il faut que ces trois pieds soient solides, travaillent ensemble en collaboration avec les jeunes dont ils ont la charge.

Pour gérer tout ce petit monde, cette grande famille de garçons de 7 à plus de 20 ans, une équipe de presque six éducateurs se relaient. Chacun effectue deux nuits par semaine. Ils sont trois chaque nuit (un pour les enfants du primaire, un pour le secondaire et un pour le supérieur) à veiller sur les jeunes.

Cependant, s’ils aiment leur métier, la question des absences pour maladie est un problème. D’autant plus lors de cette période de pandémie. En effet, les remplacements sont possibles à partir de 15 jours de maladie. Dès lors, très souvent, les collègues remplacent au pied levé leurs collègues malades puisqu’une présence la nuit est indispensable auprès des jeunes.

Les objectifs des éducateurs

La réussite scolaire est l’objectif phare. Pour y arriver, les éducateurs de l’internat namurois encadrent les jeunes afin qu’ils développent leurs compétences à s’organiser, à organiser leur travail afin d’acquérir l’autonomie nécessaire dans leurs études et dans leur vie. Des temps d’études dirigées obligatoires sont organisés. Les éducateurs sont là pour une aide constante et journalière, alors qu’à la maison ce n’est pas toujours le cas.

Un élève ayant plus de deux échecs n’a pas accès aux activités du mercredi (cinéma, piscine, bowling, musées, théâtre…) et doit rester à l’étude pour travailler. Des cours de rattrapage individualisés donnés par des enseignants qui viennent à l’internat sont également organisés.

La réussite scolaire passe aussi par le bien-être physique et psychologique des jeunes. Si certains sont là volontairement, d’autres le sont sur injonction du Service d’Aide à la Jeunesse (SAJ), ou du Service de Protection de la Jeunesse (SPJ). Les éducateurs ont donc un rôle essentiel dans tous ces aspects bien-être.

Nouer des liens

Pour créer un lien particulier avec les jeunes, les éducateurs sont à l’écoute, prennent du temps pour connaitre les jeunes qui leur sont confiés. Comme leur dit régulièrement Pascal Walhin, « On est à votre service, mais pas votre esclave. Avec le respect, tout est possible ».

L’internat qu’il dirige est tout sauf une prison. C’est un lieu de vie où les jeunes sont accueillis et aidés. D’ailleurs, tous les éducateurs que j’ai rencontrés me l’ont dit et redit : « Même des années après, on reste en contact avec nos jeunes. Ils nous saluent quand on les croise, ils passent nous donner des nouvelles. C’est hyper valorisant de voir ce qu’ils sont devenus. L’autonomie qu’ils ont acquise. C’est l’occasion de se rappeler de leurs bêtises et d’en rigoler ensemble. Ce lien est possible parce qu’on travaille avec eux sur du long terme. »

Les liens avec l’école

M. Walhin a des contacts administratifs (factures, présences, …) mais aussi structurels avec les 25 écoles différentes que fréquentent les internes. Ces liens sont essentiels à la réussite du jeune. Par exemple, l’internat s’occupe des transports scolaires matin et soir. Si un jeune déposé à l’école le matin par l’internat n’est pas présent aux cours, l’école avertit l’internat de son absence et tout un processus est mis en place avec les éducateurs pour recadrer le jeune.

Le suivi journalier des jeunes via les études dirigées fait aussi que les jeunes obtiennent de meilleurs résultats scolaires. Tout cela permet de limiter le décrochage scolaire, voire de raccrocher scolairement des élèves qui n’allaient pas à l’école pour de multiples raisons.

Avec l’explosion des plateformes numériques pédagogiques, les éducateurs regrettent que le journal de classe papier soit abandonné au profit du numérique, car ils n’y ont pas accès et cela ne facilite pas le suivi des jeunes…

Les éducateurs ne se substituent pas aux parents. Ce ne sont pas eux qui vont aux réunions scolaires, qui signent les bulletins. Ils sont là pour encadrer, pas pour remplacer. Ils ne sont pas des éducateurs encadrant des jeunes placés en institution. Ils sont des éducateurs d’internat.

Les liens avec les institutions

Comme le souligne M. Walhin, « nous entretenons aussi des liens très étroits avec le SPJ, le SAJ, les services d’Actions en Milieu Ouvert (AMO) et d’autres ASBL qui sont chargées d’un suivi spécifique de certains jeunes qui nous sont confiés pour diverses raisons liées à la protection du jeune. Notre mission est l’accueil de tous. »

Des regrets

Notre interlocuteur déplore cependant deux aspects de son métier d’administrateur d’internat : la charge administrative et l’absence de revalorisation salariale de la fonction, depuis plus de 40 ans.

Quant aux éducateurs d’internat, ils regrettent d’être souvent oubliés dans toutes les décisions prises de manière globale, car ils ont des missions spécifiques dans un microcosme spécifique.

© FWB/Boris Roko

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