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Mise en ligne le 08 septembre 2023

Pool local de remplacement : « Je suis accueilli comme le Messie »

Afin de lutter contre la pénurie d’enseignants en cours d’année, le pool local de remplacement a vu le jour. Explications du dispositif et témoignage d’un enseignant ayant participé à l’expérience.

© FWB/PROF

Lutter contre la pénurie et le turn-over

Au cours de l’année scolaire 2022-2023, un dispositif expérimental a été lancé dans deux zones géographiques (Bruxelles et Hainaut-Sud) à destination de l’enseignement primaire ordinaire : le pool local de remplacement. Onze instituteurs primaires engagés à temps plein, répartis dans sept pools, se sont lancés dans cette aventure dont la mission principale est de remplacer les professeurs absents.

Concrètement, des périodes sont octroyées aux pouvoirs organisateurs (PO), en fonction de leur population scolaire, pour recruter, à temps plein, un ou plusieurs instituteurs primaires. Un pool peut être lié à un seul pouvoir organisateur ou à un partenariat de plusieurs PO.

L’objectif du pool de remplacement est double. D’une part, il aspire à lutter contre le turn-over (taux de renouvellement) des enseignants en leur assurant une stabilisation relative de leurs attributions pendant une année scolaire complète à concurrence d’un temps plein (ce n’était pas le cas durant l’année scolaire 2022-2023 car le dispositif est entré en vigueur le 1er décembre 2022). D’autre part, dans un contexte de pénurie, il vise à permettre une meilleure adéquation de l’offre et de la demande en cas d’intérims de courtes durées.

« C'est un peu la rentrée scolaire tous les jours »

Après avoir franchi l’étape de la quarantaine, Damien Hallot a décidé de changer de vie professionnelle. Il a été titulaire durant une année dans le spécialisé mais aussi, durant trois années, instituteur temporaire, voyageant dans tous les niveaux du primaire.

En mars 2023, ce jeune enseignant a été engagé, avec deux autres instituteurs primaires, dans un pool de remplacement de la zone de Hainaut-Sud. Chacun d’entre eux est réparti sur un territoire géographique précis comportant une partie des écoles des pouvoirs organisateurs partenaires de ce pool.

De la P1 à la P6, Damien Hallot remplace les professeurs absents, donne des remédiations, soutient les co-titulariats,… Il n’est cependant autorisé à effectuer un remplacement uniquement pour une absence de maximum 5 jours consécutifs. Au-delà, la procédure « classique » pour trouver un remplaçant est appliquée.

À noter qu’un membre du personnel attaché à un pool pourrait tenter de prendre cette place vacante, à condition de démissionner. Dans ce cas, il prendrait le risque de perdre son temps plein, assuré jusqu’à la fin de l’année scolaire par le pool, pour une situation moins stable.

Trois fois par semaine, Damien Hallot reçoit un mail de son coordinateur de réseau pour savoir ce qui l’attend le lendemain ou les prochains jours. Dans ce mail, tout lui est notifié : l’établissement dans lequel il devra se rendre, l’année à remplacer, si le cours est préparé ou non, le nombre d’élèves et la présence ou non d’élèves à besoins spécifiques.

« Pour moi, c'est un peu la rentrée scolaire tous les jours. Que ce soit au niveau de l'autorité à gérer en classe, de la pédagogie, du contact avec les élèves. Ces choses prennent un petit peu plus de temps par rapport à un titulaire », admet Damien Hallot.

Gagnant-gagnant

Le costume d’enseignant dans un pool de remplacement n’est pas taillé pour tout le monde. Il demande une grande capacité d’adaptation.

« De nombreux titulaires me prennent pour un extraterrestre. Ils me disent : Comment as-tu pu accepter ce job ? C'est du bouche-trou, ça ne doit pas être agréable. » Au contraire, Damien Hallot se sent valorisé. Sa présence fait le bonheur des directions, des élèves et des parents. « Je suis accueilli comme le Messie », plaisante-t-il. « J'ai ma liberté pédagogique et je continue la matière comme si le professeur n'avait pas été absent. » De l’histoire du pool de remplacement, tout le monde sort gagnant.

L’organisation au jour le jour induite par son statut pourrait en effrayer plus d’un mais elle convient parfaitement à Damien Hallot qui assure s’amuser « comme un petit fou ». « Je suis intégré dans toutes les équipes pédagogiques de toutes les écoles. Les profs me connaissent et savent que je peux leur venir en aide. Je ne suis pas du tout le cheveu dans la soupe. »

Pour faciliter son intégration, chaque école lui a fourni une sorte de fiche d’identité. Tous les aspects y sont communiqués : des coordonnées de la direction à la sandwicherie du coin, en passant par l’endroit où se garer.

« Il y a des contraintes inhérentes au métier de professeur : la paperasse, les évaluations, les bulletins, les réunions, les contacts avec les directions et les parents. Il y a beaucoup de contraintes que je n'ai pas et, je l’avoue, ça m'arrange », confie Damien Hallot qui estime bénéficier des avantages du métier d’enseignant sans être impacté par ses inconvénients. Question de point de vue.

Ce qui est certain, c’est que ce pool lui offre un temps plein, même lorsqu’aucun remplacement n’est nécessaire. « Dans la conjoncture actuelle, avec une douzaine d'écoles, c’est très peu probable », souligne-t-il. Mais si le cas devait se présenter, il se consacre à des pratiques de différenciation au sein du pouvoir organisateur porteur.

Après le succès de son lancement, le pool local de remplacement poursuit son expérience pour l’année scolaire 2023-2024. Un défi qui peut plaire aux personnes flexibles et créatives animées par l’enseignement.

Loïs DENIS
 

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